Société d’Histoire d’Yerres  



L’Orgue de l’église Saint‑Honest d’Yerres,

une histoire reconstituée

Par Gilles Baumont
Saint-Honest-2006

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Je rédige ce préambule à la première personne, parce que la musique m’a accompagné depuis mon enfance. Ma rencontre avec l’orgue de l’église Saint-Honest d’Yerres dès les années 1950* a été pour moi un moment marquant, parmi d’autres nombreuses expériences et pratiques musicales qui ont enrichi mon parcours de musicien amateur. Plus tard, devenu archiviste à Yerres, de 1991 à 2017, mon attachement à cette commune et à son histoire s’est renforcé. C’est donc sous un double regard que j’ai souhaité "composer" l’histoire de cet instrument : celui du jeune Yerrois amateur de musique, et celui de l’archiviste, intéressé à l’histoire locale, bien accompagné par les membres de la Société d’Histoire d’Yerres.
* « vers l’âge de 10 ans, en 1955, je prenais quelques cours de piano ; étant devenu enfant de chœur à Saint-Honest, j’avais eu maintes occasions d’entendre l’instrument, notamment sous les doigts (et les pieds) de Jacques Thouvenin. Quelques années plus tard, je "touchais" l’orgue pour la première fois avec une petite fugue de Bach… Quelle émotion ! »
Mon propos n’est donc pas celui d’un spécialiste de l’organologie - discipline relative à l’étude de tout instrument de musique, pas seulement des orgues - mais bien de transmettre mon témoignage concernant cet instrument. Pourquoi devrions-nous attacher quelque importance à l’histoire d’un instrument de musique installé à la fin du XIXe siècle dans une petite église de la région parisienne ? À Yerres, l’orgue présente un intérêt particulier, parce que les conditions de son achat et de son inauguration, comme de son évolution, mettent en jeu, dans le tissu de notre histoire, des personnes et des rôles spécifiques, et donnent à l’instrument une valeur patrimoniale insoupçonnée.
Un orgue, aussi modeste soit-il, s’inscrit dans une riche parentèle : on parle de familles d’instruments, cordes, bois, cuivres, percussions, mais d’une autre ampleur est la famille des orgues, déployée sur toute la planète et à toutes les époques : instruments des grandes cathédrales, des plus petites églises et des temples, ceux des lieux de concerts, publics ou privés, en tribune, ou orgues de chœur, chacun avec sa personnalité propre.
Pour commencer
Cet article ne concerne pas les instruments dont les sons sont produits par des moyens électroniques, ceux dont la conception au cours du XXe siècle a été le fruit des progrès techniques en électronique et en informatique1, mais bien des instruments avec de vrais tuyaux, qui chantent (ou parlent) sous l’effet de l’air sous pression. Cependant, les claviers d’un orgue peuvent transmettre électriquement le son des tuyaux, et non plus mécaniquement, comme c’est encore le cas à Yerres, au moyen de leviers. Dans les deux cas, ce sont toujours des tuyaux qui chantent… La littérature concernant l’orgue est abondante, tant les approches sont diverses dans leurs aspects, technique, esthétique, religieux, économique, social. Vous trouverez un lexique et une bibliographie sommaire en fin d’article. Il est nécessaire de rappeler quelques éléments d’histoire générale : en 1919, le musicologue Curt Sachs définit l’orgue comme « un instrument à vent composé de tuyaux à une seule note, accordés selon une gamme définie, alimentés par une soufflerie et actionnés par un ou des claviers2. » Si l’on parcourt la longue histoire de l’orgue, depuis l’invention de l’hydraule3 par Ctésibios d’Alexandrie (246 avant J.-C.) jusqu’à nos jours, cette définition s’applique à tous les orgues. Il faut retenir surtout l’usage du "vent", ou air sous pression, et l’on parlera des poumons d’un orgue, de ses soufflets (ou la soufflerie). Comme dans toutes les activités humaines, la construction et les usages des orgues, la facture, suivent une évolution continue et complexe, basée sur les progrès des techniques, les besoins liturgiques, et même parfois, comme aux origines, ceux des usages militaires (en plein-air) ou des cours princières, comme au Moyen-Orient. L’orgue de Saint-Honest fait partie d’une grande tradition d’instruments d’église, depuis environ les XVe et XVIe siècles, dans toute l’Europe. Les facteurs d’orgues - on les appelait autrefois des organiers - sont connus et ont constitué souvent des dynasties familiales, qui devaient maîtriser un grand nombre de corps de métiers, qui allaient de la fonderie des métaux et leurs alliages pour les tuyaux, la menuiserie et l’ébénisterie pour les sommiers, les tuyaux en bois, les claviers, le buffet, la tannerie pour l’étanchéité, jusqu’à la mécanique pour les transmissions entre les registres, claviers et sommiers (tringlerie et abrégé, et l’utilisation du plâtre ou d’autres matériaux pour les décors du buffet.
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L’orgue de l’église Saint-Honest


« Il y a ce que l’auditeur voit : c’est peu, il y a ce qu’il ne voit pas, c’est beaucoup4. » À Yerres, l’orgue compte environ 1 000 tuyaux, commandés par deux claviers et un pédalier, qui font sonner séparément ou ensemble 14 jeux ou registres.
Le facteur d’orgue doit en outre avoir des notions d’acoustique, car les dimensions d’un orgue sont, en tout premier lieu, fonction de l’importance de l’édifice qui doit l’accueillir. À Saint-Honest, les dimensions de l’orgue ont été très bien calculées.
Un son particulier
Ce son si particulier de l’orgue, continu et stable, a une caractéristique spécifique, celle de ne pas dépendre des capacités pulmonaires de l’instrumentiste, par l’utilisation d’une soufflerie ou soufflets, à commande d’abord mécanique, puis électrique. La musique produite est liée au choix des tuyaux au moyen des registres, à leurs combinaisons et aux compositions variées. Selon les époques, différents styles apparaissent, souvent étroitement liés à la facture d’orgue, et à ses progrès techniques, liés eux-mêmes aux besoins de la liturgie ou des artistes. C’est une expérience unique d’entendre (et de produire) ce son continu, obtenu seulement par la main ou le pied, qui caractérise tout orgue : pourtant quelle complexité pour produire cet effet si particulier !

Fonctionnement d’un orgue
Très sommairement, une fois la soufflerie mise en route, la touche enfoncée sur le clavier, par un jeu de tringles, ouvre une soupape, qui laisse passer le vent (l’air) sous pression dans le tuyau, lui-même posé sur un sommier bien étanche. Dans les grandes orgues, c’est une forêt de tuyaux et au moins 2 jusqu’à 5 claviers, chacun correspondant à son sommier ; chaque clavier correspond à des plans sonores et/ou à des sonorités différentes. Celles-ci sont représentées par le nom des jeux ou sonorités spécifiques (flûtes, bourdons, trompettes, cromorne, etc.). Les nombreuses combinaisons que permet l’instrument l’ont fait parfois comparer à un orchestre ; pourtant un orgue reste un instrument à part entière - et des pièces pour orgue et orchestre ont été composées, depuis l’époque baroque (Georg Friedrich Händel en a composé six, publiés en 1638) jusqu’à nos jours. Vers la fin du XIXe siècle, les facteurs d’orgue et les compositeurs ont cherché à multiplier les sonorités de l’orgue, surtout quand il s’agissait de le faire sonner dans les grandes cathédrales, pour atteindre une expression musicale d’une grande majesté, à l’exemple peut-être de la Toccata de Jean-Marie Widor (symphonie opus 5 pour orgue solo, 1887). Les grands instruments, comme ceux, indépassés, d’Aristide Cavaillé-Coll, permettent parfois une certaine démesure ou emphase, surtout quand ils ont subi certaines modifications… La musique d’orgue des Français, notamment, et de leurs instruments des XVIIe et XVIIIe siècles, garde une saveur particulière, quand elle est composée par François Couperin, Louis Marchand ou Nicolas de Grigny
Devant la console
Ce chapitre est destiné au lecteur n’ayant jamais vu, de près, ou peut-être jamais entendu le son d’un orgue. Notre expérience habituelle est celle du son de l’orgue entendu de loin dans une église ou un temple, à l’occasion des offices ou au concert. Mais si vous vous trouvez devant la console d’un orgue, n’oubliez pas de mettre en route la soufflerie, aujourd’hui électrique depuis que cette "fée" a été domestiquée et perfectionnée, au début du XXe siècle ; tirez un jeu ou registre, puis appuyez sur (enfoncez) une ou plusieurs touches d’un clavier. Vous obtiendrez un son, continu tant que la touche, toujours munie d’un ressort, est enfoncée ; en principe, une touche correspond à un tuyau de l’orgue, mais si vous tirez deux registres, vous entendrez deux sons en même temps. Comme il y a des registres appelés mixtures, destinés à enrichir la sonorité, tandis que d’autres ont plusieurs rangs de tuyaux, vous pouvez faire chanter (on dit aussi "parler") plusieurs tuyaux en n’enfonçant qu’une seule touche. Si vous tirez tous les jeux en même temps, vous pouvez faire parler déjà des dizaines de tuyaux de l’orgue. En enfonçant plusieurs touches, si vous avez tiré tous les registres, et en utilisant des accords avec les dix doigts, vous faites parler déjà beaucoup de tuyaux. En enfonçant une ou plusieurs touches du pédalier, vous obtiendrez le son correspondant si vous avez tiré au préalable un jeu ou registre attribué à ce clavier, actionné par les pieds de l’organiste. Il est même possible, par des leviers appelés tirasses, d’accoupler tous les claviers ensemble : alors vous pouvez faire entendre des centaines de tuyaux en même temps, c’est le tutti !
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La console de l’orgue Abbey (Yerres)
Sur l’orgue d’Yerres, à la base de la console, on aperçoit ces tirasses, sortes de pédales métalliques, indiquées par les gros boutons blancs.
Mais dans l’espace d’une église, le son se prolonge, et vous entendez sa réverbération (son écho). Le mélange de tous les sons produits ensemble pourrait produire une bouillie sonore, mais la précision donnée par la facture de l’instrument, son bon accord, c’est-à-dire son harmonisation, la composition du musicien, et bien sûr le jeu et l’habileté de l’organiste, permettent de faire entendre une très belle musique, l’instrumentiste ayant la capacité de dissocier les différents plans sonores, une des spécificités de l’orgue (pour plus de détails, voir le lexique "Tuyaux").
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L’auteur à la tribune de l’église Saint-Honest
(photo Floriane Baumont)
Une rencontre inattendue et des conjectures fragiles
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L’Abbé Jousselin, portrait présumé situé dans la sacristie
de l’église Sainte-Élisabeth (photo C. d’Alessandro)
Nos recherches et nos lectures, avec les connaissances empruntées aux Archives, nous ont conduit, dans un premier lieu, sur les pas de l’abbé Éloi Jousselin, de son rôle supposé et de l’influence qu’il a pu exercer au moment de la commande de notre instrument. En effet, les travaux de recherches de M. Christophe d’Alessandro, organiste titulaire de l’église Sainte-Élisabeth de Paris, semblaient nous procurer quelques indices. Nous connaissions l’existence de l’abbé Jousselin5 par d’autres sources ; ce dernier avait de la famille à Yerres et y possédait une maison dans la rue de l’Église, très proche de l’église Saint-Honest, et il fréquentait le curé Augustin Beaumont et la famille Caillebotte.
L’abbé Jousselin était présent lors de la consécration de la Chapelle Notre-Dame du Lierre, construite en 1864 dans le parc familial. Il recevait à Yerres l’archevêque de Paris Mgr Georges Darbois, qui fut assassiné lors de la Commune. C’est en son honneur que la famille Caillebotte contribua largement à la construction de l’église Saint-Georges de la Villette à Paris, dont Alfred Caillebotte, frère du peintre, fut le premier curé. Éloi Jousselin est inhumé dans le cimetière d’Yerres à côté de plusieurs membres de sa famille. Il est le principal commanditaire du grand orgue (et de la tribune) commandé à la manufacture Suret en 1853 pour l’église Sainte-Élisabeth.
Christophe d’Alessandro, dans son ouvrage érudit sur l’instrument de Sainte-Élisabeth, écrit qu’un premier orgue de chœur avait été installé dans cette église par John Abbey6, puis revendu plus tard. Il a semblé logique de penser que nous avions là l’origine de notre instrument, d’autant plus qu’il est fait état des parcours de plusieurs orgues positifs dans diverses paroisses parisiennes, et notamment à Saint-Jean-Baptiste de Belleville où Alfred Caillebotte avait été vicaire. Par ailleurs, l’abbé Alfred Caillebotte7 commanda plusieurs orgues de chœur (positifs) à la manufacture Abbey, notamment pour Saint-Georges de la Villette, puis plus tard pour Notre-Dame-de-Lorette. L’orgue positif, c’est-à-dire "posé" à même le sol dans le chœur ou parfois derrière l’autel, construit par Abbey à Sainte-Élisabeth, en faisait un instrument beaucoup plus modeste qu’un grand orgue de tribune, et aurait pu tout-à-fait être démonté et prendre place dans la tribune d’une église de banlieue comme Saint-Honest d’Yerres, d’un moindre volume que ces églises parisiennes. Sachant que les artisans des grandes manufactures d’orgues se connaissent et même parfois peuvent échanger des ouvriers, l’imagination parfois a tendance à dépasser les faits…
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L’orgue d’Yerres, une histoire singulière

Christophe d’Alessandro a eu la grande gentillesse de me recevoir à Sainte-Élisabeth et de nos échanges, nous avons conclu que l’orgue de Saint-Honest était bien un instrument nouveau construit par les frères Abbey, les fils de John, comme le montre la suite de notre étude, confirmée par les documents d’archives.
Jacques Thouvenin, près de 50 ans auprès de son orgue
En 1997, Jacques Thouvenin8 écrivit, à ma demande, un memento9 très détaillé sur l’orgue de Saint-Honest : cet article lui doit beaucoup.
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Jacques Thouvenin
C’est en 1954 qu’il s’intéresse à cet instrument, déjà installé à la tribune depuis presque 80 ans ! C’est dire que des travaux d’entretien sont devenus nécessaires, tant les orgues ont besoin d’un entretien constant. Les différents types de chauffage dans cette église, depuis le vieux calorifère du XIXe siècle (chaudière à poussier à air pulsé), jusqu’aux systèmes au gaz, puis électriques ont créé des conditions hygrométriques et thermiques "catastrophiques", qui ont compromis la bonne marche de cet instrument à certaines périodes de sa vie, tant ses différents constituants sont précis et sensibles aux variations climatiques. Heureusement, les derniers travaux de gros œuvre de l’église en 2005, avec un chauffage par le sol au moyen d’une circulation d’eau chaude, a permis de régler les problèmes de conservation, notamment des œuvres d’art (tableaux) tout en apportant un confort agréable aux paroissiens.
Jacques Thouvenin décrit en détail l’instrument, les diverses évolutions qu’il a connues depuis 1954, et les nombreuses questions préalables aux différents choix, y sont évoquées. Retenons surtout que l’instrument, livré par les frères Abbey en 1876, ne permettait pas de jouer toutes les musiques écrites pour l’orgue. En 1954, l’instrument était encore de facture romantique. Des transformations successives à partir de 1956 - substitutions de jeux jusqu’à l’ajout du magnifique cromorne (anciennement chromorne), installé en 1988 - lui donnèrent petit-à-petit une composition plus classique. Le cromorne, ancêtre du hautbois, connaît un grand succès dans le répertoire de l’orgue français.
Même si l’instrument de Saint-Honest n’a pas la même envergure que ceux des grandes cathédrales, tout le répertoire a pu progressivement être abordé. En témoignent les concerts donnés dans la deuxième partie du XXe siècle par des organistes éprouvés, comme André Isoir, François-Henri Houbart, Odile Pierre, etc.
Avant 1954, aucun fait marquant n’est à signaler concernant l’orgue, qui avait conservé son architecture de 1876. Il était tenu par Maurice Gossiôme, maître de chapelle, et probablement épisodiquement par des musiciens amateurs. Madame Denise Loubet-Prospéro, Yerroise née en 1930, dans ses souvenirs écrits en 1999, cite un certain Monsieur Michaud comme organiste à Saint-Honest… et évoque avec émotion sa pratique musicale :
« Monsieur Maurice Gossiôme, qui était aussi conseiller municipal, avait fondé avec sa femme, une chorale - nous étions nombreux de tous les âges - tous les dimanches nous chantions la messe en latin ; tous les jours de grandes fêtes, nous apprenions de grandes et belles messes, de Mozart, Bach et autres compositeurs, - cela demandait beaucoup de travail - nous répétions, soit à l’église, soit chez M. Gossiôme. M. et Mme Gossiôme étaient musiciens. J’ai le souvenir d’une certaine cantate de Bach que j’avais chanté avec Mme Gossiôme - elle alto - moi soprano, c’était bien beau… »
Maurice Gossiôme avait écrit des poèmes et composé des chansons, notamment "Le poilu". Voir l’article sur la Grande Guerre sur le site histoire-yerres.fr.
L’achat de l’orgue
Les comptes rendus du Conseil paroissial (ou Conseil de fabrique), révèlent avec précision les préoccupations de la paroisse, soucieuse d’équilibrer les budgets, et d’arbitrer entre dépenses courantes d’entretien, renouvellement d’habits, fournitures diverses nécessaires au culte, et dépenses imprévues, comme celles liées à l’insalubrité de la sacristie et au projet de son extension (1867/68). Si les recettes sont surtout composées des droits (ou concessions) de places dans l’église, des recettes de certains offices, telles les messes commandées par testament, souvent en échange de dons et legs, la paroisse peut compter aussi sur des placements en bons du Trésor, et bien entendu sur le produit des quêtes. L’analyse de ces budgets est mal aisée, faute de pouvoir consulter en détail les différents postes. Comme on le verra, l’achat de l’orgue de tribune pour Saint-Honest représentera un effort budgétaire exceptionnel. Par ailleurs, les procès-verbaux du Conseil de fabrique ne mentionnent pas toujours ce que le trésorier détient en caisse.
Des réunions décisives
Il faut se rappeler le contexte de l’époque. Yerres sort d’une douloureuse occupation par les armées allemandes, qui a duré une année, du 15 septembre 1870 au 15 septembre 1871, et dont le témoignage précieux a été écrit par le curé Augustin Beaumont10 (cf. sur notre site Yerres pendant la guerre franco-allemande de 1870-71, PDF, 48 pages, 1 424 Koctets.) À la séance du 11 novembre 1871, M. le curé Augustin Beaumont, propose la nomination de M. Martial Caillebotte, père du peintre, pour remplacer M. Bertrand, décédé. La présence de M. Martial Caillebotte, entrepreneur et habile homme d’affaire, dans le Conseil de fabrique sera certainement déterminante, comme le laisseront supposer les décisions à venir en matière financière…
Augustin-Beaumont   Colomban-Marchand
Augustin Beaumont (1817-1887)
  Colomban Marchand (1821-1886)
À la séance du 17 novembre 1872, l’abbé Marchand11 succède à Augustin Beaumont.
La situation budgétaire de la paroisse d’Yerres
Entre 1865 et 1880, années qui encadrent l’achat de l’orgue, les budgets de la paroisse ont augmenté régulièrement, chaque exercice laissant apparaître un excédent ou une situation à l’équilibre. En regardant12 les détails des budgets de la paroisse entre 1865 et 1874, nous retenons que les finances retrouvent un peu de sérénité après les années d’occupation. On note également en 1873 et 1874, les rentes en Bons du Trésor faites par Martial Caillebotte pour le compte de la paroisse (achat 4 000 francs).
Les budgets communaux sont plus importants que ceux de la paroisse, et ont augmenté régulièrement dans la décennie 1870. La commune dut pourtant contracter un emprunt pour faire face au remboursement des dommages de guerre, peu indemnisés par l’État13. Mais ces événements n’affectèrent pas l’achat de l’orgue, qui a été commandé bien avant la loi de 1905 (séparation de l’Église et de l’État).
Citons in extenso, les délibérations les plus significatives, concernant l’orgue, riches d’informations :
« Le 12 avril 1874, le Conseil de fabrique s’est réuni sous la présidence de M. Corbel, président ; tous les membres étant présents, excepté M. Caillebotte14, empêché, il a été procédé au renouvellement du Conseil et du Bureau : M. Caillebotte, dont les fonctions expiraient, a été réélu à l’unanimité des suffrages, et M. Louis Paysan, qui avait fini son exercice au Bureau, en est sorti en demeurant dans le Conseil et a été remplacé par M. Pommier, conseiller. Après cette aspiration, le Conseil a entendu la réclamation de M. Aristide Téton15, organiste, demandant une augmentation de traitement, et il y a fait droit en élevant ses honoraires à cent francs, à la condition que le réclamant se contente désormais de cette rémunération sans demander davantage. M. le curé a ensuite fait connaître au Conseil que les travaux de menuiserie et de peinture faits à la chapelle de la Sainte Vierge avaient été supportés par la caisse de la confrérie, ainsi que les travaux de menuiserie exécutés à la sacristie et que, cela étant, il ne restait à la charge de la fabrique que la peinture de la sacristie et quelques articles de serrurerie, dont les mémoires ne sont pas encore présentés. M. le maire ayant proposé l’acquisition d’un tapis pour remplacer celui qui laisse à désirer, le Conseil a cru devoir, à son grand regret, surseoir à cette dépense, se voyant obligé de faire des économies pour l’acquisition d’un jeu d’orgues à tuyaux dès qu’elle sera possible. L’harmonium de tribune16 manque de puissance et de variété ; et d’ailleurs, un instrument de ce genre, quelle que soit sa perfection, ne peut que faire naître le désir d’avoir un orgue véritable, dont les ressources et les effets sont seuls dignes d’une église. C’est donc une question qui reviendra en son temps et quand l’état de la caisse de la fabrique permettra de l’aborder utilement. »
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Monsieur Martial Caillebotte (père)

Le Conseil de fabrique se réunit le 26 décembre 1874, le lendemain du décès de M. Martial Caillebotte, survenu à Paris le 25 décembre 1874, jour de Noël. Comme on l’a noté précédemment, M. Caillebotte fit certainement preuve de générosité, à Yerres, comme tendent à le prouver les comptes rendus des réunions des Conseils de fabrique dans les années qui ont précédé sa disparition. Son décès n’est mentionné qu’à la réunion du 4 avril 1875, « on déplore la perte de M. Caillebotte ». Il est certain que le 26 décembre 1874, les membres de la paroisse ne pouvaient encore être au courant de ce décès.
Le texte décisif est donc le compte-rendu de cette réunion du 26 décembre 1874 :
« … Enfin le Conseil a repris la question du jeu d’orgues, note qu’il s’agit de l’établir dans l’église et, jugeant que la situation de la fabrique lui permet de la conduire à bonne fin cette fois, il a été décidé qu’une commission composée de M. le président, de M. le trésorier et de M. le secrétaire se rendrait incessamment à Jouy-en-Josas et à Versailles, à l’effet de traiter avec MM. Abbey frères, facteurs d’orgues, et de leur commander un instrument dont celui de Jouy-en-Josas serait le type17 et dont le prix ne devrait pas dépasser huit mille francs. Après ces différents sujets, rien n’étant plus à l’ordre du jour, la séance a été levée. »
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signatures, entre autres, du maire, A. PERSON, et du curé C. MARCHAND
Malgré les difficultés, l’achat de l’orgue a été financé entièrement par la paroisse. Il a donc coûté 8 000 F, et un supplément de 500 F demandé par MM. Abbey, qui a été accepté à la réunion du 8 octobre 1876 :
« le jeu d’orgue est entièrement payé, et une partie un an à l’avance… l’instrument a été exécuté avec une perfection et une précision telles que depuis le 13 juin où il a été inauguré jusqu’à ce jour il n’a subi aucun dérangement, que d’ailleurs il répond à l’attente de la paroisse et la surpasse encore. La gratification de 500 francs accordée à MM. Abbey ne leur sera versée que dans deux ans et restera comme garantie entre les mains du trésorier jusqu’à cette époque. Le Conseil, mis en demeure de faire accorder l’orgue par les facteurs à raison de 25 francs le cachet, ou de 100 francs par an et se décide pour ce dernier mode et autorise l’abonnement. Il vote un traitement annuel de 75 francs au souffleur18 Alexandre Legrand. »
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L’orgue de Saint-Honest (photographie ancienne)
La soufflerie de l’orgue d’Yerres était munie d’une pompe à main, laquelle servit à Jacques Thouvenin, aidé de ses deux garçons présents en tribune, en pleine messe de minuit de Noël, parce que la soufflerie électrique était devenue trop bruyante. Elle fut remplacée en 1982, lors d’un relevage important. D’après des sources assez concordantes, il est admis que les souffleries électriques équipèrent les orgues surtout vers les années 1920, à quelques exceptions près. Nous n’avons pas trouvé de document probant pour Yerres.
L’inauguration de l’orgue
Finalement, l’orgue est inauguré le 13 juillet 1876. Le journal Le Ménestrel daté du 23 juillet 1876 fournit les détails de cet événement :
« Jeudi 13 courant, en l’église d’Yerres, à l’occasion de l’inauguration de l’orgue, construit par MM. Abbey, M. Bazille19, organiste de Sainte-Élisabeth, s’est fait entendre dans une série d’improvisations, et a fait apprécier les qualités du nouvel instrument et la valeur de son remarquable talent, Mlle M. Cottin a chanté l’Ave Maria de Gounod et le Ciel a visité la Terre du même maître avec une excellente voix et une méthode qui promet une véritable artiste. M. F. Girard, ténor à la Trinité, a dit avec âme l’O Salutaris de Lefébure et le Credo de Fauré. Le violoncelle de M. Richard Loys a chanté ensuite l’andante d’une sonate de Mozart. »

Auguste-Bazille   O_Salutaris
Auguste Bazille, par Pierre Petit (vers 1880)
(BnF, département Musique)
  O Salutaris, d’Auguste Bazille,
dédié à l’abbé Jousselin
« Ô réconfortante Hostie, qui nous ouvre les portes du ciel, les armées ennemies nous poursuivent, donne-nous la force, porte-nous secours. » (hymne composé par saint Thomas d’Aquin)
Dans la marge d’un registre de la paroisse, sous la plume de l’abbé Beaufils, curé de 1878 à 1891, on lit que l’orgue a été inauguré le 13 juin 1876, mois probablement erroné, car Le Ménestrel daté du 23 juillet 1876 indique « le jeudi 13 courant » donc le 13 juillet pour cette inauguration. Il semble bien qu’il y a simplement erreur sur le mois ; le 13 juillet 1876 tombait bien un jeudi. Un point sans importance ! Il est probable que les occupations d’Auguste Bazille à Sainte-Élisabeth et dans le monde de la musique devaient l’accaparer les samedis et dimanches à Paris, pour que l’inauguration à Yerres ne puisse avoir eu lieu qu’en semaine.
Des bienfaiteurs
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Le curé Alfred Caillebotte
Archives Notre Dame de Lorette
(© Studio Françoise Verdier)

Les gestes généreux d’une famille très riche, les Caillebotte, s’accomplirent ainsi par le père Martial, puis par les enfants Gustave, peintre mais aussi mécène des peintres impressionnistes, par Alfred Caillebotte, prêtre à l’église Saint-Georges de la Villette puis à Notre-Dame de Lorette, au profit d’œuvres paroissiales ou sociales. Leurs dons étaient faits dans la plus grande discrétion, ce qui explique la difficulté d’en découvrir des traces écrites. On lit dans la Semaine religieuse de Paris du 23 mai 1885, à propos de la générosité du curé Alfred Caillebotte à Saint-Georges de la Villette, sous la plume de M. l’abbé Caron : « gardez-vous de demander au généreux pasteur le total de ses dépenses personnelles, il ne vous le dirait pas : c’est un secret entre Dieu et lui. »
Martial Caillebotte (1853-1910), le frère cadet du peintre, avait passé des vacances à Yerres entre 1860 et 1879. Par ailleurs, il fut baptisé en cette église en 1866. Comme l’a suggéré Christophe d’Alessandro, Martial a très bien pu connaître et jouer sur l’orgue nouvellement construit à Saint-Honest.
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Martial Caillebotte fils (© Comité Caillebotte, Paris)
Martial, prénommé comme son père, suivit les cours d’Antoine Marmontel pour le piano et de Théodore Dubois pour l’harmonie, au Conservatoire de Paris. Son œuvre, bien qu’éditée de son temps, n’a été jouée qu’au début des années 2000. Elle présente les diverses facettes d’une authentique personnalité musicale. Elle comprend des pièces pour piano, des mélodies, un opéra, de la musique religieuse. La messe solennelle de Pâques a été jouée à Yerres en 2014, à la salle du CEC, par Michel Piquemal et l’ensemble Victoria : elle comporte une partie pour l’orgue.
D’autres mécènes étaient connus à Yerres, comme les Blazy, propriétaires de la filature de laine, qui a fonctionné dans l’ancienne abbaye tout au long des XIXe et XXe siècles. Tous ces bienfaiteurss peuvent être considérés dans ces époques comme des facteurs de cohésion sociale, tant les institutions publiques et religieuses cohabitaient naturellement, malgré leurs évolutions internes. On constate aussi que le maire est - de droit ou non - membre du Conseil paroissial, avec le curé et quelques autres membres.
La musique, une affaire sérieuse
Mais revenons quelques années en arrière. Le 1er juillet 1833, est dressé un inventaire complet des biens de l’église. On trouve, parmi les missels, un graduel et un antiphonier (ou antiphonaire), c’est-à-dire un livre contenant les chants des offices - à l’usage du diocèse de Versailles grand in folio, reliés en veau avec garniture de cuivre, un graduel et un antiphonier à l’usage du diocèse de Paris, précision intéressante en fonction de la proximité des deux diocèses avec Yerres. On ne sait ce qu’il est advenu de ces objets.
Dans le courant du XIXe siècle, la vie sociale à Yerres se développe ; écoles congréganistes et écoles publiques cohabitent. La vie "culturelle" n’est pas en reste : des groupes, pas encore "associations de la loi de 1901", se constituent. Le 26 novembre 1865, la Société Orphéonique20 existe déjà et la commune participe pour moitié au coût des leçons, et on note des « remerciements pour le don d’une bannière à la Société Orphéonique ». Mais le 3 juin 1866, la commune cessera de payer les leçons du professeur, car il ne reste plus que 4 ou 5 membres.
On trouve les statuts de "La fanfare yerroise" approuvés en préfecture le 15 octobre 1899 ; quant à la musique pratiquée dans notre église, elle est certainement celle des chants d’église, hymnes ou prières rassemblées dans ce qui est appelé l’ordinaire de la messe, fixé par différents conciles au cours du temps. On dispose de quelques détails des pratiques musicales, notamment par la mention d’un harmonium, de serpents21 accompagnant un ou deux chantres.
Pédagogie, rigueur et activité rémunérée à l’église
Toujours en remontant le temps, on note, à la séance du dimanche 9 mai 1833 :
« Messieurs les membres du Conseil de fabrique, considérant qu’il était urgent de veiller avec soin à l’instruction des enfants de choeur ont décidé que le maître d’école serait invité à donner chaque jour une classe de chant aux enfants de choeur, et divisant son traitement, ont arrêté que sur la somme de 86 frs qu’il reçoit comme traitement, 50 frs seraient spécialement destinés à lui être payés comme traitement de maître des enfants de choeur, et 36 frs comme chantre suppléant. »
Et le même jour, retenue à opérer sur les chantres :
« … ceux-ci reçoivent 1 fr pour chaque vacation (processions de la St-Marc et des rogations et pour le jour de la première communion). Toutes les fois que l’un deux manqueraient à s’y rendre, il subirait une retenue égale à l’allocation qui lui est faite pour sa présence. »
Nous avons noté que le joueur d’harmonium, les chantres, les joueurs de serpent, et tout un personnel lié au culte et à l’enseignement, encore très proche de l’église, touchaient une indemnité qui était discutée chaque année au Conseil de fabrique22.
Déjà le 1er avril 1805, le traitement de chacun des chantres et du bedeau est de 30 F par an. En 1832, la dépense annuelle pour les chantres est de 186 F, ce qui doit correspondre à 4 ou 5 personnes. Quant au serpent (sous-entendu "celui qui joue du serpent"), il apparaît dans le registre de la paroisse du mardi 1er juillet 1834 :
« Les chantres (4 premiers), le serpent et le maître d’école recevront une augmentation de chacun quatre francs, à la charge de veiller au blanchissage et au menu entretien de ses aubes, du bonnet carré et du camail et en outre à la charge d’assister aux services nationaux qui seraient demandés soit par le gouvernement, soit par Mgr l’évêque. Les deux jeunes chantres et les encenseurs recevront une augmentation de chacun deux francs aux mêmes conditions.
En conséquence, le traitement du maître d’école est porté à 90 frs. Celui des deux premiers chantres à chacun 40 frs. Celui des deux seconds chantres et du serpent, 30 frs. Celui des deux troisièmes chacun à 20 frs. Celui des encenseurs à 2 frs. »
On en conclut, qu’en 1834, il y a 6 chantres et un joueur de serpent pour les accompagner. Lors de la séance du 10 avril 1864, le budget pour 1865 inscrit au chapitre "personnel", une dépense de 264 francs, pour 4 chantres et serpent à 66 francs. Est ajoutée une ligne pour un jeune chantre, soit 20 francs. Lors de la séance du 23 avril 1865 : dépenses pour deux chantres et un serpent à 70 F chaque + un chantre à 30 F.
La recherche historique, une pépinière de questions
La tribune
L’abbé Jean Moreau23 indique la présence d’un grand escalier qui encombrait le choeur, et qui a fait place au petit escalier en colimaçon qui mène aujourd’hui à cette tribune. La tribune, d’après de nombreux détails des archives paroissiales, a donc préexisté à l’installation par les frères Abbey de notre instrument. Souvent, une tribune est construite pour accueillir un instrument, comme ce fut le cas à Sainte-Élisabeth de Paris. Quant au style de cette tribune, il semble marqué par la simplicité et s’accorde bien avec celui du buffet, construits du même bois, le sapin. De là on pourrait supposer que le buffet et la tribune sont l’œuvre du même artisan ; des menuisiers ne manquaient pas à Yerres, et on en trouve mention dans certains textes de la paroisse.
Les logements de fonction
Nous savons par les Archives communales, qu’un bâtiment servant d’école et de logement à l’instituteur était accolé à l’église, du côté de la place, à gauche du petit porche actuel. Des descriptions contenues dans les registres de la paroisse, mentionne aussi l’usage d’un vicariat, c’est-à-dire un logement pour un vicaire. Ce bâtiment a fait l’objet d’un litige entre la commune et la paroisse, qui en revendiquait la propriété. De nombreux travaux à l’extérieur et à l’intérieur de l’église (décorations, installation de la chaire, etc.), au cours du XIXe siècle, ont sans doute conduit à la destruction de ce bâtiment. On peut supposer qu’il communiquait à l’intérieur de l’édifice et permettait peut-être d’accéder à la tribune.
Quelques corrections de date
L’ouvrage de Jean Vatus (cf. bibliographie) indique la construction de notre orgue en 1860, date manifestement erronée d’après notre étude. Par ailleurs, l’année d’installation en 1878 a été indiquée parce qu’elle marque la fin du sacerdoce à Yerres de l’abbé Colomban Marchand, qui fut le commanditaire de cet instrument, fait qui fut précisé par son successeur l’abbé Beaufils. Commandé en décembre 1874, c’est bien en 1876 que cet instrument a été inauguré.
Conclusion
Dans cette petite histoire, nous avons rencontré en premier lieu les administrateurs de la fabrique paroissiale réunis autour de ses curés, le premier facteur d’orgues et ses successeurs, assez nombreux, les organistes, professionnels ou amateurs. Quelques personnages importants de notre recherche se connaissent, se fréquentent et, sans doute, jouent un rôle discret, éclairant un peu plus le contexte historique du village d’Yerres.
L’amitié d’Éloi Jousselin avec les curés d’Yerres, avec la famille Caillebotte, Yerrois lui-même, et curé de Sainte-Élisabeth, ont joué un rôle certain dans la naissance de notre instrument. Grand amateur de musique, c’est lui qui, naturellement, invite Bazille, titulaire de l’orgue de Sainte-Élisabeth, à inaugurer le nouvel orgue d’Yerres le 13 juillet 1876.
Retenons que l’achat de cet instrument, malgré les difficultés des temps, résulte d’une volonté commune et opiniâtre de la part du curé Marchand et de paroissiens cultivés et sensibles, comme lui, à une musique propre à enrichir la liturgie. Sur le berceau de cet instrument, se sont alors penchées des personnalités très attachées au village d’Yerres. Bien des énigmes demeurent, faute de pouvoir consulter des documents d’archives publiques ou privées, quand il en existe ! D’autres, à la suite de Jacques Thouvenin, ont préservé cet attachement dont tout patrimoine a besoin pour son entretien et sa transmission. N’oublions pas ceux qui, avec la commune, en assurent la continuité dans le temps présent.
La relève, comme l’appelait de ses vœux Jacques Thouvenin, est aujourd’hui assurée par Nicola Serravalle. Ayant suivi sa première formation au Conservatoire d’Yerres, puis au Conservatoire Royal de Bruxelles, il est aujourd’hui professeur de piano. II s’est pris, lui aussi, de passion pour l’orgue d’Yerres, et assure les offices tout au long de l’année. Venez l’écoutez chaque dimanche à 18h.
Nicola-Serravalle
Nicola Serravalle (photo Gilles Baumont - 2020)
Lexique
Buffet : l’ensemble de la boiserie qui contient les tuyaux de l’orgue et les pièces intermédiaires (sommiers, mécanismes, etc.). D’après Pierre Maciet, le buffet d’Yerres, en sapin, n’aurait pas été construit dans les ateliers d’Abbey, mais est probablement un buffet de réemploi - mystère sans réelle importance. Les Archives de la paroisse n’ont pas été classées méthodiquement, quand elles n’ont pas été perdues, et la découverte d’un dossier précis (devis, facture) sur l’instrument reste très incertaine.

Console : partie qui contient les claviers, le pédalier, les tirants (ou boutons) des jeux, les pièces qui commandent des dispositifs permettant d’accoupler les claviers entre eux, d’obtenir un vibrato (tremblant) ; dans certains instruments, l’organiste peut facilement depuis la console appeler ou renvoyer des jeux préparés à l’avance, sans nuire à la fluidité du discours musical. Cependant, il peut être nécessaire d’avoir recours à un aide, pour l’exécution de certaines pièces particulières.

Abrégé : dispositif mécanique, situé à l’arrière de la console, permettant de rapporter dans l’espace des claviers, par des leviers et vergettes, les tuyaux disposés dans tout l’espace du buffet. Sans l’abrégé, il serait impossible à l’organiste, de donner la parole à l’ensemble des tuyaux.

Claviers : (et clavier de pédale) clavier du grand-orgue, clavier de récit, et sur les plus grands instruments, un clavier dit "positif" correspondant à un troisième plan sonore… à ne pas confondre avec le positif de chœur, qui désigne un orgue destiné à l’accompagnement des chœurs, positif signifiant "posé". Les claviers d’un orgue (et le pédalier) sont identiques à ceux d’un piano, même si l’orgue, avec le clavecin, ont plusieurs siècles d’avance sur le piano (fin XVIIIe, début XIXe siècles).

Tuyau : la pièce qui chante (ou "parle"). Les tuyaux sont de plusieurs catégories et sont construits dans des matières différentes. D’abord les tuyaux de section ronde, tuyaux à bouche (partie ouverte visible dans la partie inférieure du tuyau), flûtés et nombreux dans un orgue et constituant le (ou les) fonds d’orgue ou principaux, souvent en alliage d’étain et plomb. Les jeux d’anches (trompette, clairon, cromorne…) sont en métal et ont des sonorités brillantes, qui se détachent du plan sonore des principaux, et autorisent des récits contrastés et très beaux. L’anche est une petite lamelle, qui fait vibrer le son, comme dans une clarinette ou un hautbois. Ces tuyaux sont munis d’une rasette, petite pièce coulissante qui permet de les accorder. Des jeux de bourdons, souvent en bois et de section carrée, quelquefois en étain et de section ronde, fermés à l’extrémité supérieure par une sorte de tampon, complètent la structure sonore d’un orgue. Enfin quelques jeux de mutations (les mixtures, tierce, nasard), s’ajoutent au principaux pour enrichir la sonorité. Les dimensions des tuyaux (longueur en pieds, largeur en pouces) sont importantes, puisqu’elles déterminent la hauteur des sons de la gamme (suivant les principes de Pythagore). À Yerres, on dit que l’orgue est un 8 pieds "en montre", ce qui signifie que ses plus grands tuyaux ont environ 2,40 m de longueur ; pour obtenir le son de 16 pieds, on utilise le bourdon, qui n’a pourtant pas la même longueur que les grosses flûtes. Le 16 pieds est déjà très grave. Dans les grandes églises, comme à Notre-Dame de Paris ou à Chartres, les orgues comportent des 32 pieds, soit d’environ 10 m de longueur.

Ces grands tuyaux, pour chanter (ou "parler"), doivent être placés dans un édifice d’une grande longueur, pour y installer les ondes stationnaires d’un son pur et audible. À Yerres, il serait impossible de faire chanter des tuyaux de 32 pieds ! Nombreux sont les 8 et 4 pieds, et les plus petits peuvent mesurer quelques centimètres seulement.

Jeu ou registre : de l’article précédent, on déduit qu’il y a des jeux simples (une note pour un tuyau, comme le cromorne ou la trompette), et des jeux composés (plusieurs rangs de tuyaux pour une note). Dans les deux cas, c’est un jeu ou registre, actionné par un tirant ou un bouton (comme un interrupteur). L’orgue de Saint-Honest comporte aujourd’hui 16 jeux et pas loin de 1 000 tuyaux.

Montre : désigne l’ensemble des tuyaux visibles à l’avant du buffet d’un orgue (dits aussi en façade). À Saint-Honest, ces tuyaux sont des basses de flûte et de montre (8 pieds) et de prestant (4 pieds).

Registration : choix des jeux ou registres, déterminés par le compositeur ou choisis par l’organiste, variant selon la pièce jouée.

Sommier : pièce gravée, dont l’étanchéité doit être parfaite, où sont posés les tuyaux d’un orgue. Le sommier contient d’autres pièces : la chape, pièce de bois percée qui accueille la base des tuyaux de l’orgue ; les boursettes, petite poche de cuir assurant l’étanchéité du sommier, entre soupape et boîte à vent.

Tutti : (de l’italien "tous ensemble"), terme musical désignant le fait que tous les instrumentistes jouent en même temps ; pour l’orgue, la notion sa rapporte à la musique produite par tous les claviers (et pédalier) et tous les jeux actionnés ensemble.

Soufflerie : dispositif permettant d’envoyer l’air sous pression dans les sommiers. Depuis les années 1920, les souffleries électriques ont progressivement remplacé les pompes manuelles, ou les soufflets à pieds qui alimentaient les grandes orgues aux origines.

Facture : mot qui renvoie à fabrication et s’applique surtout aux facteurs d’instruments de musique.

Relevage : opération consistant en un démontage complet ou quasi complet d’un orgue, pour le nettoyage, le remplacement ou l’entretien des pièces qui le constituent. Le dernier relevage à Yerres a été fait en 2019 par Pierre Maciet : « L’orgue est de belle facture. La qualité́ de la tuyauterie d’origine est conforme au standard Abbey. » Mais avec le temps, des interventions plus ou moins adroites ont fait évoluer l’appareil. Après sept mois de travaux, l’orgue de Saint-Honest est désormais en parfait état de fonctionnement. C’est le fruit d’un travail minutieux pour redonner à l’instrument un nouveau souffle : nettoyage complet, traitement des fuites d’air, remise en état de certains tuyaux, réglage de la mécanique et accord général, lequel est effectué régulièrement.

Chantre : nom donné à l’origine à ceux qui chantaient la messe.

Orgue positif : c’est l’orgue de chœur des grandes églises, "posé" souvent sur le bas-côté de la nef, parfois derrière l’autel, au chevet de l’église. Il est destiné à l’accompagnement des chœurs. Mais certaines pièces font dialoguer les grandes orgues de tribune avec l’orgue de chœur : par exemple, la Messe solennelle de Louis Vierne (1870-1937) pour chœur et deux orgues op. 16.

Harmonisation : opération consistant à accorder tous les tuyaux d’un orgue, en respectant des principes complexes qui relèvent des lois de l’acoustique, et qui peuvent varier selon les périodes et les styles musicaux.
Bibliographie sommaire
Remerciements
À Monique Patron, Véronique Gossiôme-Ronçin et André Bourachot, membres de la Société d’Histoire d’Yerres, Michel Cerles, curé d’Yerres, Marie-Thérèse Debeuf et les membres de la paroisse, Denise Loubet-Prospéro, Dominique Thouvenin, Christophe d’Alessandro, François Letendre, Valérie et Pierre Maciet, Nicola Serravalle, Alain Vatteville, webmaster.

Références :

1. Ces instruments dits "numériques" sont généralement de petite taille et sont posés dans le chœur des petites églises ; grâce à leurs sons bien échantillonnés, ils rendent de grands services pour l’accompagnement des offices, ou pour des concerts, à défaut de disposer de "grandes orgues" ou même d’un orgue positif à tuyaux.

2. Cité dans Friedrich Jacob, voir bibliographie.

3. Au Musée de l’orgue, à Roche près de Lausanne, j’ai pu voir un hydraule reconstitué, système qui provoque de l’air sous pression, par dépression d’un récipient rempli d’eau, relié à quelques touches faisant chanter des tuyaux (aulos).

4. Norbert Dufourcq, cf. bibliographie.

5. Éloi Jousselin (1794-1880) : nommé à Sainte-Élisabeth en 1842, l’abbé Jousselin s’attache à embellir l’église de tableaux, de boiseries, puis de faire édifier une tribune et de grandes orgues, commandées à la manufacture Suret, dès 1843-1844. Un nouvel orgue de chœur est installé par Suret en 1871.

6. Eugène et John-Albert Abbey ont succédé à leur père, l’anglais John Abbey (1785 - 1859). Aux XIXe et XXe siècles, la manufacture, longtemps installée à Versailles, était réputée au-delà des frontières et a perduré jusqu’en 1930. Sous Louis-Philippe, en 1837, un orgue de John Abbey est loué pour une fête à Versailles (Olivier Baumont, la Musique à Versailles, Actes sud-CMBV 2007 p. 358).

7. Alfred Caillebotte (1834-1896), premier enfant d’une première épouse, exerça un sacerdoce remarquable dans Paris, et fut considéré parfois comme le curé le plus riche de Paris ; la fortune paternelle acquise dans le commerce des draps aux armées, profita pleinement aux œuvres d’église.

8. Jacques Thouvenin (1927-2018), agrégé de physique, fit toute sa carrière au CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique). Spécialiste de détonique, il a travaillé sur la propagation des ondes de choc nécessaires à l’amorçage des armes nucléaires. Très bon organiste amateur, il tint la tribune pendant près de 50 ans ! Il assura assidûment les offices et s’occupa activement de l’entretien de l’instrument, donnant parfois de ses deniers pour assurer certaines dépenses. La commune d’Yerres, propriétaire depuis la loi de 1905 de l’édifice et des objets (dont l’orgue), autres que ceux destinés au culte, avait pris en charge les plus grosses dépenses, depuis 1957 jusqu’au dernier relevage de 2019.

9. Ce memento très complet est consultable aux Archives communales.

10. Curé d’Yerres de 1863 à 1872. Nos recherches nous conduisent à penser que l’achat d’un orgue était déjà dans les intentions du curé Beaumont. Plusieurs fois dans son récit, il raconte qu’il a prêté son église aux occupants pour leurs offices. Il fait allusion à la beauté de la musique produite et envie la ferveur religieuse de toutes ces troupes, en soulignant le contraste entre leur comportement - « À l’église ce ne sont plus les mêmes hommes » - et leur cruauté à l’égard des Yerrois. « L’église est comble, elle n’a jamais vu autant d’hommes recueillis prier à la fois. »

11. Curé d’Yerres de 1872 à 1878, Laurent Colomban Marchand, chanoine honoraire né à Morainvilliers en 1821, est décédé à Versailles en 1886, comme curé de Saint-Symphorien.
Dans la Semaine religieuse de Versailles du 11 avril 1886, la nécrologie de l’abbé Marchand, comme curé d’Yerres, met seulement à son actif, la construction d’« un très bel orgue ». On lit plus loin : « il était passionné pour le chant d’église. De magnifiques orgues et une très belle cloche ajoutée aux deux autres, témoignent de son amour pour la splendeur de la maison de Dieu. » Il s’agit ici de l’église Saint-Symphorien de Versailles, son dernier sacerdoce. Cet orgue date de 1882 et fut commandé aux frères Abbey.

12. Lors de la réunion du 12 avril 1874, on note : « … d’autre part, M. Caillebotte informe par lettre le conseil que la somme qu’il a placée au nom de la fabrique s’élève aujourd’hui, intérêts et principal à la somme de 2 321 francs ; le conseil remercie Monsieur Caillebotte de son zèle et le prie de garder entre ses mains le titre jusqu’à nouvel ordre, ce dont monsieur Caillebotte veut bien encore se charger. »

13. cf. sur notre site Yerres pendant la guerre franco-allemande de 1870-71, PDF, 48 pages, 1 424 Koctets.

14. Martial Caillebotte (1799-1874), originaire de Domfront, était entrepreneur (service du lit militaire à Paris). Il avait constitué une fortune importante, dont ses enfants profitèrent, faisant preuve à la suite de leur père, d’une très grande générosité dans l’action sociale et paroissiale (Alfred, le curé) ou artistique (Gustave, le peintre). Il fut aussi conseiller municipal à Yerres. En 1860, il avait acheté et embelli la villégiature yerroise (aujourd’hui "la Maison Caillebotte"). Elle fut revendue en 1879, après le décès de Mme Caillebotte en 1878.

15. Aristide Téton est le premier des deux fils de Jean-Baptiste Téton, instituteur public. D’après le recensement de la population de 1866, la famille habite au 37, rue de Paris, adresse qui pourrait correspondre à la mairie-école construite en 1849. En 1871, Aristide alors âgé de 26 ans est devenu secrétaire de mairie, En 1876, année de l’inauguration de l’orgue à Saint-Honest, ils habitent au 36 rue de Paris, le bâtiment de la mairie (devenue la Poste centrale) est encore aujourd’hui du côté des numéros pairs de la rue Charles de Gaulle. On ne trouve plus cette famille à cette adresse en 1881. C’est certainement Aristide Téton qui a "hérité" du nouvel orgue des frères Abbey, après de bons et loyaux services derrière son harmonium… On notera la double fonction de secrétaire de mairie et d’organiste d’Aristide Téton… Jean-Sébastien Bach, à Leipzig fut en même temps cantor (maître de chapelle) et enseignant, activités proches de celles d’un fonctionnaire, au sens moderne.

16. Il y a donc un harmonium dans la tribune en avril 1874 ; aujourd’hui en 2023, 2 harmoniums (en mauvais état) sont toujours présents dans l’église… Quant à la tribune, sa construction - dont la mention ne figure pas dans les registres de la fabrique - semble donc avoir précédé la construction de l’orgue. [Lire en fin d’article le chapitre concernant la tribune]

17. Le facteur d’orgue Pierre Maciet, qui connaît très bien les instruments d’Abbey, m’a confié que les instruments de Jouy-en-Josas, celui-ci construit en 1874, et d’Yerres « étaient quasiment jumeaux. »
La manufacture Maciet, fut fondée par Adrien Maciet en 1966, après qu’il fût lui-même formé chez Erwin Muller comme harmoniste, après être passé par tous les postes existant en facture d’orgues. Pierre son fils a travaillé (depuis 1986) à ses côtés jusqu’en 1995, année de sa mort. Depuis 7 ans, Oscar Maciet s’est orienté en facture d’orgue après un bac général, il débuta dans la manufacture familiale durant deux années puis fut embauché chez Mulheisen et chez Quentin Requier en tant qu’apprenti en alternance avec le CFA d’Eschau. Il passa donc son bac professionnel de facture d’orgue en trois ans, puis se spécialisa en tuyauterie deux années supplémentaires. Il vient de passer deux ans à l’école "la bonne graine" pour deux années en ébénisterie, et revient maintenant à l’atelier familial de Montainville. Oscar poursuit en ébénisterie visant cette fois un Brevet des Métiers d’Art. Autrement dit un apprenti de 23 ans avec déjà plus de sept ans d’expérience ! Depuis 1966, la manufacture Maciet a produit 4 ou 5 instruments neufs, des relevages à foison, des restaurations innombrables (y compris instruments classés Monuments Historiques), et assure l’entretien d’une centaine d’instruments. Les derniers chantiers finis cet été (2023) sont Montmorency et Choisy-Le-Roi (d’après les informations fournies à l’auteur par Pierre Maciet). Où l’on voit la spécificité et la variété des domaines que doit maîtriser le facteur d’orgues…

18. Rappelons que l’orgue est bel et bien un instrument à vent. Avant d’être remplacé par le moteur électrique dans les années 1920, la mécanique de sa soufflerie était actionnée par des humains ! Le souffleur d’orgue a été longtemps, très longtemps indispensable à l’organiste pour actionner la mécanique de la soufflerie et tout simplement pour faire sonner l’instrument. Pendant que l’organiste improvisait fugues et passacailles au clavier, un ou plusieurs souffleurs transpiraient en actionnant, à bras ou au pied la pompe des soufflets mécaniques, dans l’ombre, incognito. Un métier qui pourrait être jugé ingrat, dont on trouve finalement assez peu de traces dans les archives.
Un travail d’équipe
Pour un orgue de taille modeste comme celui d’une petite église de campagne, un seul souffleur suffisait. La motivation était au rendez-vous pour actionner la pompe sans faiblir au milieu de la messe. Comme certains souffleurs étaient distraits ou tombaient de fatigue en plein morceau, bien cachés sur le côté ou derrière l’instrument, on avait fait installer un jeu relié à une clochette, appelé "le timbre du souffleur", que l’organiste actionnait pour communiquer avec son souffleur, voir pour le tirer de sa sieste.

19. Auguste Bazille (1828-1891) fut le premier titulaire en 1853 de l’orgue Suret de Sainte-Élisabeth… «  il commence a être connu comme un remarquable organiste. » Il fut aussi professeur d’accompagnement au Conservatoire, premier chef du chant à l’Opéra-comique. Bazille avait fait de brillantes études au Conservatoire, où il avait obtenu les premiers prix de solfège, d’harmonie, d’orgue et de fugue. Il fréquente tous les musiciens importants de cette époque, comme César Franck, Charles Gounod, Camille Saint-Saëns.
Bazille participe à de nombreuses inaugurations d’orgues, dont celle de l’orgue de Saint-Honest, en 1876.

20. Un orphéon est un groupe de voix d’hommes.

21. Le serpent, ancêtre du tuba de l’orchestre, fut construit vers la fin du XVIIIe siècle, et doit son nom à sa forme ; l’instrument était destiné à accompagner les chantres, c’est-à-dire ceux qui assuraient les chants aux offices. À Saint-Honest, leur rémunération était fixée chaque année par le Conseil de fabrique ; ils étaient plusieurs, comme l’indiquent les archives dès 1805 ; on doit supposer que le chant liturgique est pratiqué ici comme ailleurs depuis plusieurs siècles. On trouve la trace de cet instrument dans toutes les paroisses, notamment à Yerres.
À Sainte-Élisabeth, le serpent, augmenté parfois d’une ou plusieurs contrebasses, est remplacé par l’organiste accompagnateur à partir de 1837 (cf. bibliographie, C. d’Alessandro). De nos jours quelques spécialistes s’intéressent à cet instrument d’un autre temps.

22. À propos de ces "traitements" et "honoraires", soulignons le fait qu’aujourd’hui, les musiciens amateurs sont bénévoles, à de rares exceptions près. Un organiste est souvent un professeur diplômé, des chanteurs et chanteuses pratiquant dans des chorales, ne touchent un cachet que si leur pratique est régulière et professionnelle…

23. Jean Moreau (1908-1986) fut curé d’Yerres de 1967 à sa mort. Il a écrit une monographie très complète L’église Saint-Honest